LA PATRIE BURGONDE

Nous, Burgondes, nous touchons aux deux bords de l’Europe, le Sud et le Nord. Unissant les peuples qui le foulaient, notre sol douloureux a été le creuset où se forma la culture de l’Occident. Les Romains ont passé là au milieu des vieux Celtes, puis nos pères aux yeux bleus sont venus et sont restés. Nous avons gardé, de tant de tumultes féconds, plus de nostalgie que d’orgueil.

A voir passer les peuples, à voir venir les conquérants et partir les esclaves, notre sens burgonde s’est affolé. Au Sud, au Nord, inclinant tour à tour, y voyant toujours quelque patrie perdue ou rêvée, l’âme des ancêtres blonds, hésitante, naïve, est devenue sceptique. Nous avons gardé une attirance étrange, invincible pour des mondes divers ; et cependant nous avons fixé notre rêve ainsi : Notre Patrie n’est plus de ce monde.

La patrie burgonde n’est plus de ce monde. Ne la cherchons point. Elle est vers les cygnes et aussi vers les sirènes. Elle est près des elfes, des trolls, mais aussi vers l’Olympe.  A force d’hésiter, notre destin s’est effacé. Et les Dieux, accoudés à nos collines, regardant le Rhin et le Rhône rouler leurs eaux contraires, nous inspirent, hélas, des songes contradictoires.

Le Rhône ? nous y sommes allés. Il va vers toi, ô Méditerranée, divine amie. Il se jette en toi qui est le foyer du monde radieux. Il apporte à ton glauque azur l’émeraude triomphale des eaux d’Helvétie.

Il va vers le Soleil, vers les flots clairs, les vents tièdes, les pins et les oliviers. Il roule vers la lumière. Il coule vers les pays d’Aphrodite et d’Héraclès, vers les Sirènes.

Le Rhin ? nous y sommes allés. Il va vers l’Océan du Nord, vers la mer hyperboréenne qui borne le monde. Il va vers les brumes et les forêts, vers les flots sombres, les sapins et les aulnes. Il coule vers les pays de Freya et dOdin, vers les cygnes. Vers les monstres qui gîtent au sein des éternels nuages, des tempêtes et des nuits longues. Il roule, calme, fort et rapide.

Où es-tu ? ô toi, mémoire burgonde.

 (textes extraits de Johannès Thomasset)

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Comments

[fonzie]

bonjour

Bourguignon d'adoption, je viens de découvrir ce blog bien sympathique

j'adore les textes de J. Thomasset et les livres d'Henri Vincenot qui à aussi largement ca place sur ce blog

bonne continuation

JLM