ÊTRE BURGONDE D'ABORD

Pour être Bourguignon, il faut d'abord se sentir Burgonde.

J’ai quitté la patrie primitive, hyperboréenne, étendue dans les brumes.

J’ai marché vers la patrie promise, vers la Méditerranée lumineuse et radieuse.

J’ai suivi le Rhin, vers le Nord, vers le Nord.

J’ai suivi le Rhône, vers le Sud, vers le Sud.

Je me suis fixée au juste milieu, entre le monde allongé vers la lumière et le monde germanique aux sombres forêts.

Je me souviens de tout mon passé. Qui suis-je ?

Je suis la mémoire burgonde.

Nous, Burgondes, nous gardons la double nostalgie ; celle du Nord et celle du Sud. Nous aimons d’un égal et mélancolique amour et les eaux sombres du Rhin et les eaux claires du Rhône.

Notre cœur cherche la patrie primitive, dans les solitudes nordiques et nos yeux quêtent la patrie tant espérée, la lumineuse Hellène. Ainsi, nous attirent les hommes du Nord et les choses du Sud.

C’est pourquoi nous aimons si fort le soleil et si profondément les forêts profondes.

Nous sommes la mémoire burgonde.

Fervents de l’azur, nous sommes inconsolables des nuages. Mais nous savons unir ces contrastes : nous faisons du soleil avec du vin et notre tristesse est un brouillard plus précieux et plus fort que celui des rives scandinaves.

Placés entre la mer divine et les saintes forêts, nous portons l’inquiétude des pensées qui oscillent entre deux certitudes.

Et nous suivons avec une égale mélancolie et le Rhin brumeux et le Rhône bruissant.

Notre passé remonte en gros sanglots.

Je suis la mémoire burgonde.

J’ai la nostalgie des âmes du Nord, des mers vêtues de brumes, de la neige nue des montagnes, des sommets aux tombantes épaules de glace, des forêts humides, de la lèvre froide des étangs.

J’ai le souvenir du soleil méridional, de la chair blanche des rochers, de la nudité divine des mers, des vibrantes cigales, du rude torrent de la lumière.

Tour à tour nous charment les mélèzes, les bouleaux, les oliviers et les pins, la neige pure et la mer éclatante.

Je suis la mémoire burgonde.

(avec des extraits de textes de Johannès Thomasset)

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